Fin de cycle conjoncturel

L’économie américaine est entrée dans la dernière phase de son cycle conjoncturel, ce qui est cohérent avec la stabilisation du taux de chômage à un niveau bas et le ralentissement de la croissance.

Selon le National Bureau of Economic Research aux Etats-Unis, les récessions sont des phénomènes fréquents qui surviennent en moyenne tous les cinq ans. Elles font donc partie d’un schéma normal. Quel que soit le régime de taux de change, le gouvernement en place où les institutions – ou leur absence – un constat historique s’impose : les récessions sont des choses qui arrivent.

Selon les données historiques, aucune décennie depuis 1854 n’a échappé à une récession. En outre, depuis 1900, tous les présidents issus du parti républicain ont été confrontés à au moins une récession. Par conséquent, si Donald Trump parvient à éviter une récession au cours de son mandat, il sera un président vraiment extraordinaire.

Notre définition de la fin de cycle conjoncturel correspond aux 36 mois qui précèdent le début d’une récession. La croissance est la première variable économique présentant un intérêt car elle est très étroitement associée au concept de récession. Il existe une définition simple et largement acceptée de la récession : deux trimestres consécutifs de contraction du PIB. Outre le PIB, nous mesurons la croissance de la production industrielle et manufacturière, qui donne une estimation précise et rapide de l’état du cycle conjoncturel. Dans le passé, ce n’est que dans les douze derniers mois que la croissance ralentit.

Les données relatives au marché de l’emploi brossent un tableau similaire à celui dépeint par les chiffres de la croissance. Le taux de chômage se stabilise environ 12 mois avant le début d’une récession. Dans l’intervalle, les créations d’emplois ralentissent brusquement, passant de plus de 200.000 postes par mois à environ 150.000. Les chiffres de l’inflation mettent également en évidence un schéma très spécifique : l’inflation a tendance à s’accélérer en fin de cycle conjoncturel.

Les chiffres actuels de l’emploi et de l’inflation sont globalement conformes aux données historiques mettant en évidence une fin de cycle conjoncturel. En revanche, la croissance est plus difficile à évaluer car elle a été faible jusqu’ici et n’a pas ralenti significativement ces derniers temps. Quoi qu’il en soit, cette approche suggère qu’une accélération de la croissance semble improbable.

En fin de cycle conjoncturel, le taux d’intérêt à court terme, c’est-à-dire celui fixé par la Fed (taux des fonds fédéraux), augmente progressivement, ce qui est cohérent avec le mandat de maîtrise de l’inflation assigné à la banque centrale. Les taux d’intérêt à long terme, tels que mesurés par le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans, ne révèlent quant à eux aucune tendance particulière.

Ils restent globalement inchangés lors des 36 derniers mois. La pente de la courbe des rendements, qui correspond ici au différentiel entre le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans et le taux des fonds fédéraux, est riche en enseignements. Un peu plus de 12 mois avant le début de la récession suivante, ce différentiel devient négatif.

Il convient de noter que la pente de la courbe des rendements est un indicateur que les investisseurs et les banques centrales suivent de très près. La Réserve fédérale de New York a mis au point un modèle inspiré de cette idée pour estimer la probabilité de récession dans les 12 prochains mois. À l’heure actuelle, la probabilité d’une récession débutant en février 2018 est très faible (4,2 %).

Enfin, le marché actions américain, tel que mesuré par l’indice S&P 500, atteint son apogée environ 12 mois avant le début de la prochaine récession. En revanche, les bénéfices continuent à augmenter tout au long de la période, avec à la clé une compression des ratios cours/bénéfices.

Le comportement actuel des variables financières ne conforte guère le scénario de l’entrée dans une fin de cycle conjoncturel car la pente de la courbe des rendements est nettement positive, même si cette pentification s’atténue, et les ratios cours/ bénéfices continuent à augmenter du fait de la progression des prix tandis que la croissance des bénéfices est poussive.

Il n’existe pas de cycle conjoncturel standard. Chaque cycle est différent et il serait hasardeux de définir une allocation d’actifs en se fiant aveuglément à l’analyse d’un cycle conjoncturel moyen virtuel. Toutefois, il est vrai que certaines tendances régulières peuvent être observées au fil du temps et il convient de les prendre au sérieux.

Les statistiques économiques livrent de nombreux indices tangibles d’une fin de cycle conjoncturel. Les chiffres du chômage et de l’inflation plaident en faveur d’un tel scénario. D’un autre côté, les chiffres de l’emploi et de la croissance suggèrent que, si nous sommes dans la phase descendante du cycle conjoncturel, nous ne sommes pas encore dans la dernière ligne droite (12 derniers mois). Ils laissent également entrevoir un ralentissement de la croissance.

De ce point de vue, les données financières suggèrent globalement que l’économie américaine vient à peine d’entrer dans la phase finale du cycle conjoncturel. Il s’agit d’une période au cours de laquelle les taux courts augmentent, la courbe des rendements s’aplatit mais demeure ascendante et les ratios cours/bénéfices augmentent.

À en juger par ces résultats, la prochaine récession ne devrait pas intervenir avant 2019, ce qui laisse entrevoir une poursuite de la hausse des taux courts et des cours des actions.