Les effets des programmes de rachat d'actions

Les programmes de rachat d'actions sont populaires auprès des entreprises et des investisseurs. Ils ont eu, ces dernières années, un impact significatif sur le marché boursier. Mais ils ont aussi des conséquences à long terme, dont les investisseurs doivent être conscients, explique Duncan Lamont, responsable de la recherche chez Schroders . Lorsqu’un dividende plus élevé est versé aux actionnaires, cela induit un risque de croissance plus faible à long terme. Les investisseurs doivent donc se demander ce qu'ils veulent.

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Duncan Lamont

Un programme de rachat d'actions permet à l’entreprise de racheter ses propres actions sur le marché. C'est un moyen de rendre de l'argent aux actionnaires, au même titre que le versement d'un dividende. Les investisseurs peuvent offrir leurs titres en vente ou les conserver et accroître ainsi leur participation dans la société. La différence avec un versement de dividende est qu'il s'agit d'un programme aux contours bien définis, tandis qu'un dividende suppose un engagement continu.

1. Les programmes d'achat supplantent les versements de dividendes

Les rachats d'actions sont aujourd'hui beaucoup plus populaires que les dividendes. Au premier semestre 2018, les sociétés américaines ont déjà consacré 200 milliards de dollars au rachat d'actions, contre environ 100 milliards de dollars au versement de dividendes. Il y a 20 ans, ce chiffre n’atteignait « que » 30 milliards de dollars.

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2. Les grands programmes de rachat sont un signal d’alerte par rapport au sentiment

Les entreprises peuvent choisir d'investir des liquidités dans leur croissance future ou de les distribuer à leurs actionnaires. Quand il n'y a pas d'opportunités d'investissement attrayantes, il vaut mieux rembourser les actionnaires. Des dividendes élevés versés aux actionnaires peuvent donc être révélateurs d’une absence d’opportunités d'investissement. Le fait que, ces dernières années, les entreprises aient distribué environ 100 % de leurs bénéfices sous la forme d'une combinaison de dividendes et de programmes de rachat d'actions (ce chiffre est connu sous le nom de taux de distribution) peut être considéré comme préoccupant. À titre de comparaison, ce taux était d'environ 60 % en juin 2009.

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Source : S&P, données jusqu’au 30 juin 20183. Des dividendes élevés ont des conséquences graves à long terme

Les dividendes élevés versés aux actionnaires semblent attractifs, mais ils limitent la capacité de réinvestissement des entreprises. Cela peut porter préjudice à une croissance durable à long terme. Avec une distribution de près de 100 % des bénéfices, le taux de croissance durable retombe à 0 %. Ce serait catastrophique.

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Source : MSCI, Schroders

4. Les entreprises sont les plus gros acheteurs sur le marché

Bien que les marchés boursiers aient connu une progression considérable, ils ne remportent pas les faveurs des investisseurs. Les cicatrices de la crise financière sont encore trop récentes. De plus, beaucoup d’investisseurs institutionnels, comme les fonds de pension, ont réduit leurs placements en actions au fil du temps afin de limiter le risque et de mieux être en adéquation avec leur passif. Les obligations et les actifs alternatifs étaient plus en vogue. Si les entreprises n'avaient pas mis en place autant de programmes d'achat, le rendement des actions américaines n'aurait jamais été aussi élevé. La grande question est de savoir ce qui se passera si cet appui du monde des entreprises venait à disparaître. Un retournement à ce niveau risque aussi de déclencher une rotation vers des marchés hors USA.

5. La faiblesse des taux d'intérêt a été un facteur déterminant. Que se passera-t-il si les taux augmentent ?

Les taux bas ont été un des moteurs des programmes de rachat d'actions. Que se passera-t-il si les taux d'intérêt augmentent ? Ce pilier des marchés boursiers va-t-il alors disparaître?

6. Le rachat d'actions embellit le bilan et dope le bonus

Le rachat de ses actions par la société réduit le nombre d'actions en circulation. Cet artifice permet d’augmenter considérablement le bénéfice par action. Plus de 70 % des sociétés du S&P500 ont réduit le nombre d'actions en circulation entre le T3 2017 et le T3 2018. Cela a pour effet de doper le bénéfice par action. Pour les entreprises, il s’agit aussi d'un des critères de rémunération de leurs dirigeants. La rémunération de ces derniers augmente en effet lorsque le bénéfice par action augmente. Dans le pire des cas, des programmes de rachat d'actions peuvent être mis en œuvre pour assurer le profit personnel à court terme.