ME Perspective 2019 - Les marchés émergents dans l’attente d’un affaiblissement du dollar

Les spécialistes Schroders des marchés émergents et des actions et obligations asiatiques donnent leurs prévisions pour 2019. Ils s’accordent à dire qu'un affaiblissement du dollar américain en 2019 aura un effet favorable pour les marchés émergents qui affichent une reprise prudente. Ils incitent aussi les investisseurs à tenir compte du ralentissement de la croissance de l’économie chinoise en 2019.

Dette

Selon James Barrineau, Co-Head of Emerging Markets Debt Relative, les rendements de la dette des marchés émergents se situent à un niveau concurrentiel par rapport aux prévisions pour les actions en 2019. La baisse du dollar américain agira sans doute comme un véritable catalyseur de gains de change supplémentaires.

James Barrineau affirme que les marchés émergents se remettront en 2019 des effets négatifs de l'appréciation du dollar et de la forte croissance économique aux États-Unis. Ces effets ont entraîné un déplacement de la liquidité des obligations, comme ce fut le cas durant la période 2014-2016, lorsque la Fed a mis fin à l'assouplissement quantitatif et qu’elle a relevé les taux d'intérêt. Comme à l'époque, les monnaies ont été le mécanisme d'ajustement par excellence pour les pays sous pression.

Bien que les rendements locaux aient donc été très négatifs, la plupart des marchés émergents n'ont pas dépensé leurs précieuses réserves de change dans une vaine recherche de stabilité monétaire. Quand la fumée se sera dissipée, ils pourront constater que leur solvabilité ne s'est pas sensiblement détériorée, que la dette en dollars n'est pas considérée comme un risque sérieux de défaut et qu'une lente reprise de la croissance économique va pouvoir s’enclencher.

Actions

D’après Tom Wilson, Head of Emerging Market Equities, les principaux catalyseurs potentiels de la performance des marchés émergents en 2019 sont la faiblesse du dollar américain, un résultat meilleur que prévu dans les échanges commerciaux avec la Chine et un tassement de la croissance chinoise.

Le sentiment concernant les marchés émergents reste prudent, ce qui se traduit par des valorisations plus faibles. Les ratios cours-valeur comptable et cours-bénéfice sont inférieurs à leur moyenne à long terme. C’est le signe d'une prévision de gain prudente. Tom Wilson s'attend à ce que les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine se poursuivent. Une escalade de ces tensions risquerait de plomber encore davantage le sentiment concernant les marchés émergents. Le scénario qu’il juge le plus probable est celui d'un enlisement sans escalade, ce qui pourrait bien avoir un effet positif.

Pour Tom Wilson, le principal catalyseur sera l'affaiblissement modéré du dollar auquel on s’attend en 2019 en raison du léger essoufflement de l'économie américaine. Les marchés émergents s’en trouveront soulagés.

Actions Asie ex-Japon

Quatre gestionnaires de fonds en actions asiatiques pensent qu’une année 2018 tumultueuse a rendu les actions asiatiques nettement moins chères, ce qui offre des opportunités sélectives, mais les investisseurs doivent faire preuve de prudence.

Pour Toby Hudson, Head of Asian ex Japan Equity Investments, les prévisions de croissance en Asie se sont détériorées. Il identifie quatre raisons : le ralentissement de la croissance en Chine, l'impact de la hausse des prix pétroliers, la hausse des taux d'intérêt en Inde, en Indonésie et aux Philippines, ainsi que l'escalade du conflit commercial entre la Chine et les États-Unis.

Matthew Dobbs, gestionnaire de fonds Asian Equities & Head of Global Small Cap, est d’avis que malgré le conflit commercial, il subsiste encore de belles opportunités d'investissement chez les exportateurs asiatiques. Il voit également des opportunités d'investissement prometteuses parmi une série d'actions de croissance orientées vers le marché domestique dans des secteurs tels que les loisirs, les soins de santé, les services internet ainsi que la formation et l’enseignement. Matthew Dobbs recommande aussi de tenir à l'œil un certain nombre de banques asiatiques.

Pour Robin Parbrook et Lee King Fuei, la Chine s'enfonce de plus en plus dans un marais économique et risque de devoir dévaluer sa monnaie ou affronter une récession. Bien qu'aucun de ces deux scénarios ne soit un scénario de base pour Robin Parbrook et le Lee King Fuei, l'Asie traversera une période douloureuse si l'un des deux devient réalité. Compte tenu de la taille actuelle de l'économie chinoise et du volume du commerce intrarégional, la région peut se réjouir de n’attraper qu’un rhume et pas pire quand la Chine éternue. Dans ce contexte, ils encouragent les investisseurs à être prudents et à suivre avec attention les tendances économiques en Chine.

Obligations asiatiques

Angus Hui, RMB Fixed Income, s'attend à ce que le dollar américain perde de sa vigueur en 2019 lorsque le rythme des hausses des taux d'intérêt américains va commencer à ralentir. Ce tassement du billet vert fera diminuer la pression sur les obligations asiatiques l'an prochain.

Selon Angus Hui, les États-Unis ont dépensé beaucoup d'argent en 2018 pour dépasser les prévisions. La croissance de l'économie américaine a aussi été plus forte que prévu. Les taux d'intérêt ont augmenté plus rapidement qu’escompté, ce qui a renforcé le dollar américain (USD) plus que prévu. Cette combinaison de facteurs a suscité beaucoup de craintes sur les marchés obligataires asiatiques, ce qui s’est traduit par des résultats négatifs.

Pour 2019, il s'attend à un tassement du dollar, ce qui fera diminuer la pression sur les devises asiatiques. C'est particulièrement vrai pour l'Inde, l'Indonésie et les Philippines, qui ont le plus souffert cette année, même si les perspectives de croissance mondiale restent incertaines et que le ralentissement de l’économie chinoise peut encore s’accentuer.

Actions chinoises

Louisa Lo, Head of Greater China Equities, préfère adopter une position défensive et reste sous-pondérée en actions chinoises, notamment dans le secteur technologique chinois.

Au cours de l'année à venir, elle sera sélective et optera pour des pays et des sociétés qui affichent des bilans solides et disposent d'un large accès aux canaux de financement. Avec des rendements allant de 2 % à 9 % sur l'ensemble du spectre de la qualité du crédit en dollars et en devises asiatiques et compte tenu de la possibilité croissante d'un pic des rendements américains, elle estime que les obligations asiatiques constituent un terreau fertile pour les investisseurs à la recherche de plus-values de capital et de rendement de haute qualité en 2019.

Compte tenu des circonstances actuelles, Louisa Lo occupera une position relativement défensive l'année prochaine, l'essentiel de l'exposition étant concentré sur les noms et secteurs tournés vers le marché intérieur et offrant une croissance à long terme. Schroders reste sous-pondérée par rapport aux valeurs technologiques, eu égard aux incertitudes liées à la réglementation. Louisa Lo donne la préférence au secteur de l'énergie, aux compagnies d'assurance et aux entreprises qui profitent de la consommation intérieure, où une reprise de l'activité des consommateurs hors ligne est visible. Les valorisations des actions chinoises sont devenues plus attrayantes et suggèrent une reprise à moyen terme pour les investisseurs. Mais ces derniers resteront sans doute prudents à court terme, compte tenu de la probabilité de nouvelles révisions à la baisse des prévisions de bénéfices, de la persistance de l'incertitude commerciale et de la hausse continue des taux d'intérêt américains dans les prochains mois.

En tant qu'investisseur bottom-up, Louisa Lo continue de privilégier les sociétés qui sont les mieux placées pour amortir le ralentissement actuel et profiter des tendances favorables à long terme qui sont encore visibles sur le marché.