Six raisons d'investir dans des obligations à rendement négatif

Il paraît peu judicieux d’investir dans des obligations à rendement négatif. Les spécialistes en obligations de Schroders pensent qu’il y a pourtant de bonnes raisons de le faire.

Les taux d'intérêt semblent partis pour rester négatifs un bon moment

Les effets de l'effondrement des rendements obligataires mondiaux depuis la fin de l'année dernière sont toujours perceptibles sur les marchés financiers. Le rendement obligataire américain à dix ans est passé de 3,2 % à 1,5 %. Mais pire encore, les courbes de rendement des obligations souveraines allemandes et suisses sont entièrement négatives. À l’heure actuelle, des obligations à hauteur de plus de 16 billions de dollars - soit 29 % du marché obligataire mondial de type investment grade - ont un rendement négatif (22 août 2019). Seul le marché de la dette en dollars offre encore un rendement légèrement positif.

Les taux d'intérêt semblent partis pour rester négatifs un bon moment. Même les États-Unis envisagent aujourd'hui des taux d'intérêt négatifs. Du point de vue de l'investisseur, cela soulève un certain nombre de questions essentielles. Après tout, qui a envie de payer pour prêter de l'argent ? Et pourtant, il reste judicieux d'investir dans des obligations à taux négatif. Schroders énumère les six raisons justifiant de le faire.

1. Le rendement couvert compte

Lorsqu'on investit en devises étrangères, le risque de change est généralement couvert. Les coûts (ou rendements) supplémentaires de la couverture ont un effet sur l’attractivité des obligations. Par exemple, un Bund allemand à 10 ans avec un rendement de -0,6 % semble peu attractif pour les investisseurs en USD. Les frais de couverture sont basés sur la différence entre les taux à court terme américain et allemand et, comme le taux à court terme américain est beaucoup plus élevé que l’allemand, les investisseurs reçoivent de l'argent pour couvrir leur exposition à l’euro. Avec 2,2 %, ils réalisent un rendement qui est même supérieur à celui des bons du Trésor américain à dix ans.

Même si l’on s’attend à ce que la Fed réduise ses taux d'intérêt, tant que le différentiel d'intérêt entre les États-Unis et la zone euro restera important, les obligations allemandes resteront attractives pour les investisseurs américains. Il en va de même pour les investisseurs dans d'autres obligations des marchés développés. En fait, la couverture de change peut transformer des rendements négatifs en rendements positifs.

2. Revenu contre croissance du capital

Les investisseurs en obligations à rendement négatif subissent une perte s'ils conservent ces obligations jusqu'à leur échéance. Mais beaucoup d’investisseurs ne le font pas. Un investisseur qui s'attend à ce que les taux d'intérêt baissent encore plus peut profiter de la croissance du capital. Début 2019, la dette suisse à 10 ans offrait un taux d'intérêt de -0,1 %. Malgré cela, son rendement a atteint 5,6 % jusqu'en août. Cet effet peut cependant jouer dans les deux sens. Une hausse des taux d'intérêt peut entraîner des pertes importantes.

3. Diversification

Dans le cadre d’une large diversification d'actifs, les obligations jouent toujours un rôle important malgré des taux d'intérêt négatifs. Il existe une corrélation négative relativement forte entre les obligations et les actions. Les obligations se portent mieux lorsque les marchés boursiers font grise mine, et inversement. La limitation des risques est particulièrement importante en période de stress. Lorsque les investisseurs recherchent des valeurs refuges, les obligations d'État profitent en général du fait que les capitaux quittent les marchés boursiers.

Cela signifie que même les obligations à rendement négatif peuvent encore réduire considérablement le risque d'un portefeuille de placement.

4. Engagements à remplir et rendement négatif

Les investisseurs ayant des engagements futurs, comme les assureurs et les fonds de pension, semblent moins préoccupés par les rendements obligataires. Ils achètent souvent de la dette en contrepartie de leurs engagements. S’ils n’investissent pas dans des obligations à rendement négatif, les autres types d’investissement risquent d’entraîner une exposition à des risques significatifs en cas de nouvelle baisse des taux d'intérêt.

5. Les obligations comme couverture contre la déflation

Beaucoup d'actifs sont en difficulté en période de déflation. Les obligations d'État à taux fixe font exception à cette règle. Une obligation à rendement négatif peut donc produire un rendement réel positif en période de déflation. Ces obligations peuvent donc servir de couverture contre la baisse des prix. Nombre d’investisseurs craignent que le monde ne se retrouve dans un scénario de déflation prolongée à la japonaise. Les obligations à taux fixe peuvent bien performer dans un tel contexte.

6. Quelle est l’alternative?

Même si les investisseurs ne sont pas satisfaits d'une obligation à rendement négatif, quelle est l’alternative qui s’offre à eux ? Sauf à accepter de prendre plus de risques, il y aura toujours une demande pour des obligations à rendement négatif.