Richard Woolnough |
Cette récession vient principalement du secteur des services : si l’on regarde l’effondrement du secteur des services par rapport au secteur manufacturier, son caractère unique nous apparaît clairement. Cela n’a rien d'étonnant. La consommation de services nécessite des interactions humaines, actuellement restreintes. D’après la pensée économique traditionnelle, cette récession serait placée dans la catégorie des récessions causées par des barrières commerciales : le commerce dans le secteur des services a été entravé ou découragé, et ces barrières commerciales sont à l’origine de la récession.
L’ampleur et le caractère unique de ce ralentissement apparaissent clairement dans les chiffres du PIB américain : on observe un effondrement historique et désormais les prémices d’un rebond record, s’apparentant alors à une économie qui fait du yoyo.
Ces barrières commerciales dans le secteur des services réduisent très fortement le PIB. Heureusement, les gouvernements du monde entier ont répondu à cette récession de façon spectaculaire favorisant un transfert de richesses colossal du secteur public vers le secteur privé. Ces deux facteurs distinguent cette récession des précédentes.
Le secteur public a efficacement réduit l’impact économique des politiques mises en place en réponse au virus. La Fed a maintenu ses prévisions optimistes pour l’économie par rapport aux récessions précédentes, sur la base des commentaires de son « livre beige » publié deux fois par trimestre (intitulé « Summary of Commentary on Current Economic Conditions » ou Résumé des commentaires sur les conditions économiques actuelles). La fréquence relative des mots à caractère négatif (tels que, « ralentissement », « faible ») dans les rapports de la Fed apparaissent beaucoup moins souvent que lors des récessions passées.
L’effondrement du PIB observé cette année est spectaculaire. Son ampleur laisse penser que nous devrions même peut-être parler de dépression plutôt que de récession. Par dépression, il est généralement entendu un effondrement du PIB d'au moins 10% sur deux ans. Jusqu'à présent, le PIB a déjà enregistré une chute annuelle de plus de 10%. À plus long terme, sommes-nous dans une dépression ?
Il est facile d’évaluer la probabilité d’une dépression : elle est fonction de la réduction de l’intervention des politiques publiques dans le secteur des services. Cette réduction dépendant vraisemblablement des avancées sur le développement d’un vaccin, des soins hospitaliers, des effets saisonniers et de la force du virus. Les deux premiers progressent, et on peut penser, comme ce fut le cas dans le passé, que le virus finira naturellement par ne plus circuler grâce aux mesures mises en place pour l’atténuer et le contrôler. Mais quel type d’économie aurons-nous après le virus ?
Il est intéressant de se demander si le PIB réel retrouvera ses niveaux d'avant la récession. Selon moi, ce sera le cas dans les six mois suivant d’éventuels changements de politique publique. L’excès d'épargne, la relance de la consommation et des gouvernements n’affichant pas d’empressement à imposer des mesures d’austérité sont autant de facteurs indiquant une forte croissance et des niveaux de consommation record.
Ces dernières années, on a voulu éviter à tout prix le phénomène de type Expansion - Effondrement. Cette fois-ci, espérons que le cycle s'inverse en Effondrement - Expansion et que nous connaissions une récession en forme de « t ».