Brexit: risque essentiellement local

La décision du Royaume-Uni de sortir de l’Union européenne a constitué une énorme surprise, les derniers sondages donnant une avance assez confortable à l’hypothèse du Remain.

Marccraquelin
Marc Craquelin

Cette décision fait naître un grand nombre d’incertitudes politiques et, par conséquent, économiques. Une récession est probable au Royaume-Uni. En zone euro, il faut compter sur un ralentissement de l’activité, l’incertitude pesant sur les décisions d’investissement. Ce ralentissement devrait être cependant assez modéré, les conditions financières tendant dans l’ensemble à s’assouplir (baisse de l’euro, baisse des taux d’intérêt).

La réaction déterminante des banques centrales devrait permettre d’éviter tout risque systémique et de limiter la contagion hors Europe. Le Brexit ne constituerait donc qu’un risque essentiellement local. Sur le plan financier, la liquidité interbancaire est abondante : nous ne sommes pas dans la situation de 2008. Les banques centrales neutralisent largement le canal du change en intervenant pour limiter les fluctuations trop importantes, notamment une trop forte appréciation du dollar, préjudiciable aux émergents et aux matières premières. Sur le plan commercial, enfin, les liens entre le Royaume-Uni et le reste du monde sont faibles et non systémiques.

En revanche, la prime de risque politique va rester présente à court terme en raison de nombreuses échéances électorales. Le referendum constitutionnel en Italie en octobre sera très important car il y a à la clé une éventuelle démission de M. Renzi (et donc un possible adieu aux réformes). Les élections américaines constituent aussi une inconnue majeure, avec le risque d’une mauvaise surprise Trump. Enfin, à plus long terme, le vote en faveur du Brexit, en décomplexant les électeurs et les partis extrémistes, va polluer l’agenda politique avant les élections législatives aux Pays-Bas (mars 2017), législatives et présidentielles en France (avril et juin 2017) et législatives en Allemagne (septembre 2017).

Outre la réaction des banques centrales et les évolutions du modus operandi du Brexit, l’autre point d'attention des marchés sera la croissance économique de part et d’autre de l’Atlantique.

Avant le Brexit, l’économie européenne était en convalescence, sur un sentier de croissance compris entre 1,5 et 2,0% pour les 3 prochaines années, avec plusieurs moteurs allumés : consommation des ménages, construction et investissement des entreprises. Les incertitudes liées au Brexit ne sont pas susceptibles de replonger la zone en récession. Elles ne devraient retirer que 0,5 point de croissance, mais il faudra attendre probablement plusieurs mois avant d’y voir plus clair.

Quant à la santé de l’économie américaine, les derniers chiffres restent relativement mitigés. Si la résistance des demandes d’indemnisation chômage indique que la faiblesse des créations d’emploi de mai a été probablement exagérée, les commandes de biens durables déçoivent ; elles indiquent un momentum toujours négatif au niveau de l’investissement des entreprises. Au total, la croissance du PIB devrait être légèrement inférieure à 2% cette année.